lundi 16 avril 2012

Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie IV

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( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie I)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie II)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie III)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie IV)

Suite...

Espérer ce que le monde n'espère pas 

Sur quelle haute montagne l'Ange du Seigneur devrait-il nous faire monter pour que nous ayons la vision de la Cité sainte descendue d'auprès de Dieu et pénétrant le tissu de nos cités terrestres (Apocalypse 21, 10) ? Comme le visionnaire de l'Apocalypse, nous ne sommes pas simplement invités à rester les yeux levés vers le ciel, mais à discerner la présence du ciel sur la terre. Nous pouvons faire plus que reconnaître ici-bas la présence efficace d'un certain nombre de valeurs dont la teneur et la pertinence sont toujours soumises à discussion. Nous devons accueillir la pré­sence du Seigneur lui-même. Par son incarnation en Jésus de Nazareth, Dieu est venu demeurer parmi les hommes et il continue à agir au cœur de l'humanité au-delà de l'Ascension, par le don de l'Esprit Saint et la vie que cet Esprit suscite au cœur du peuple des disciples du Christ qui se constitue à travers l'espace et le temps. Par la vision de la foi, et non par l'expé­rience de l'évidence physique, nous sommes invités à reconnaître la présence de Celui que nul n'a jamais vu, et ne verra jamais ici-bas.
Le visionnaire de l'Apocalypse n'est pas quelqu'un qui décrit ce que tout le monde peut voir, mais celui qui voit ce qui ne se voit pas. Paradoxalement, il est le visionnaire de l'Invisible. Il discerne une réalité invisible au cœur de la réalité visible et annonce que la présence de cette réalité invisible transforme l'uni­vers dans lequel nous vivons pour lui donner une forme nouvelle. Il est visionnaire parce qu'il annonce ce qui n'est pas encore arrivé ou ce qui est seulement en ébauche dans la réalité présente.

Etre visionnaire pour croire en l'Europe

Nous pouvons dire, sans risque de nous tromper, que la période récente de la vie de l'Europe aura été propice aux visionnaires. Pour croire à l'unité de l'Europe à peine quelques années après la fin de la Seconde Guerre mondiale, il fallait en effet percevoir quelque chose que tout le monde ne voyait pas ! Après trois conflits san­glants en moins de quatre-vingts ans dans lesquels s'étaient opposés le peuple allemand et le peuple fran­çais, il fallait être visionnaire pour croire en l'Europe et en la possibilité d'une réconciliation. Plus encore, pour anticiper que cette réconciliation ouvrirait la construction d'un ensemble plus vaste, il fallait être capable de discerner dans l'expérience historique la pro­messe de quelque chose qui la dépassait et de saisir que cette réconciliation deviendrait progressivement l'arma­ture et une sorte de colonne vertébrale de l'édification d'une certaine unité entre les peuples de l'Europe.
Robert Schuman a été l'un de ces visionnaires. Il n'a pas été le seul. Mais ceux-là, qu'ont-ils vu que tout le monde ne voit pas ? Qu'ont-ils espéré que le monde n'espère pas ?
Cette question peut être éclairée par les propos du Christ que nous avons entendus dans l'Évangile : « C'est la paix que je vous laisse, c'est ma paix que je vous donne ; ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne » (Jean 14, 27). Nous retrouvons ici, pour ceux qui en sont familiers, un procédé très fréquent dans l'Évangile de saint Jean, qui consiste à utiliser un mot qui fait partie du vocabulaire habituel et qui a un sens immédiat pour tout le monde : la paix, et à nous faire découvrir que ce mot est susceptible d'une lecture nouvelle. C'est ce que le Christ fait en désignant le pain comme le Pain de Vie1 ou l'eau comme l'Eau vive2, ou quand il parle de lui-même comme étant la lumière. Ces mots se réfèrent pour nous à une expérience quo­tidienne. Dieu merci, comme Mgr Pierre Raffin3 le rap­pelait tout à l'heure, la paix évoque une réalité que nous connaissons bien. Au sens de « fin des conflits », elle évoque à la fois un soulagement et une exultation, per­ceptibles par exemple dans l'enthousiasme et la liesse des foules sur les images nostalgiques des bandes d'actualité de ce 8 mai 1945. « La paix ! Enfin la paix après ces six années ! » Nous poumons dire aussi : « Toujours la paix après ces soixante-quinze ans ! ». Mais quelle est cette paix ?
« Je ne vous donne pas la paix comme le monde la donne », dit le Seigneur (Jean 14, 27). Le monde avait donné la paix du silence des armes, la paix impo­sée par la suprématie économique et technologique, la paix d'une victoire et d'une défaite. Le mérite des visionnaires fut de percevoir que cette cessation des hostilités n'allait pas être un armistice perpétuel comme il en existe un certain nombre à travers le monde, mais le premier moment d'une relation nou­velle. Cette vision fut juste, là où auparavant d'autres visionnaires avaient pu se tromper. Cinq ans après la fin de la guerre, ils furent capables d'annoncer et de mettre en œuvre la fin de l'antagonisme héréditaire qui opposait Allemands et Français et l'entrée dans une nouvelle phase de l'Histoire. La paix n'était plus seulement la fin du conflit, le silence des armes et le temps des redditions sans condition, mais l'inaugura­tion d'une nouvelle manière de vivre ensemble.

La paix qui vient du Christ

Cette paix qui vient du Christ est la construction d'un destin commun et pas simplement - négativement -l'abstinence de la guerre. Elle s'enracine et s'alimente de cette présence de Dieu au cœur de l'histoire humaine. Elle se réfère au fait que Dieu demeure au milieu des hommes. La foi donne de voir que les péri­péties de l'histoire humaine ne sont que la trame et la matière d'un drame spirituel beaucoup plus profond, qui s'est noué depuis la création du monde entre l'Alliance que Dieu veut conclure avec les hommes et l'infidélité de l'humanité. Aujourd'hui, il faut être visionnaire pour croire que cette Alliance est possible et qu'elle repose sur l'accueil que nous réservons à la Parole de Dieu, sur la lumière que nous puisons dans la méditation de l'Écriture, sur la motivation et la force que nous rece­vons de l'Esprit Saint. Celui-ci ne nous constitue pas comme témoins visionnaires d'une utopie irréalisable, mais bien comme acteurs prophétiques d'une construc­tion aujourd'hui possible, comme Robert Schuman le fut en son temps. Sa conviction quant à l'avenir de l'Europe s'enracinait dans son histoire personnelle, lui qui était né aux confins de ces deux Empires et appar­tenait de quelque façon à ces deux cultures. Mais insé­parablement, Robert Schuman fut également le prophète d'une autre réalité, grâce à sa foi chrétienne qui l'avait convaincu que l'avenir de l'Europe serait dans la concertation, la collaboration et la communion plutôt que dans la concurrence et le conflit.
On a souvent fait référence aux racines chrétiennes de l'Europe comme s'il s'agissait d'entretenir la nos­talgie d'un autre âge de notre continent ou de se mettre en vedette comme les défenseurs d'un patrimoine culturel que nos temps modernes risqueraient d'oublier. Peut-être n'avons-nous pas assez aidé à comprendre que la racine réfère davantage à une ori­gine qu'à une chronologie ? Toujours est-il que le patrimoine chrétien de l'Europe n'est pas la muséo­graphie des idéologies chrétiennes, mais le trésor vivant qui nous permet, aujourd'hui, de croire par-delà l'expérience visible en la réalisation d'un projet invi­sible. Nous vivons de l'espérance que l'accueil et la mise en œuvre de la Parole de Dieu ouvre à l'amour vécu entre les hommes et les femmes d'une génération par-delà l'hérédité des conflits, et à l'espérance de pouvoir surmonter les intérêts particuliers de chaque nation pour constituer un projet commun. Tout ceci repose sur la conviction que chaque femme et chaque homme est appelé à entrer dans l'Alliance avec Dieu, à devenir partenaire de cette Alliance et à surmonter les limites et les barrières des particularismes, des fixa­tions culturelles et des blocages historiques pour dis­cerner une nouvelle cité à travers notre cité terrestre. Cette nouvelle cité est lumière sur ce monde, présence de Dieu au milieu des hommes, espérance des hommes dans la Parole de Dieu et promesse pour l'avenir.
En faisant aujourd'hui mémoire de la déclaration de Robert Schuman le 9 mai 1950, nous ne faisons pas simplement un acte de commémoration. Nous essayons de comprendre comment la conviction inté­rieure et l'histoire de ce Mosellan chrétien ont fait de lui un visionnaire dans la société de son temps et un prophète pour l'Europe qu'il espérait.
Rendons grâce à Dieu qui a suscité au cours des décennies écoulées des témoins de cette stature. Bénissons-le d'avoir mis au cœur de beaucoup de nos contemporains le désir que leur vision devienne réalité. Et demandons-Lui qu'il fasse de nous des artisans de Sa paix, des hommes et des femmes réconciliés entre eux parce qu'ils sont réconciliés avec Lui.

Justice et paix sociale

Dans le passage du livre de Ben Sirac le Sage2 que nous avons entendu, nous disposons d'une sorte de catalogue des comportements à adopter pour le bien de tous. Je voudrais simplement revenir sur l'un de ces commandements, qui peut éclairer d'une manière particulière l'époque où nous vivons : « N'exaspère pas un homme qui est dans la misère » (Siracide 4, 2).
Cette prescription nous invite à réfléchir en profondeur sur la manière dont notre société traite la culpabilité. Pour de multiples raisons, beaucoup de nos contemporains sont devenus particulièrement susceptibles ou délicats, et ils prennent souvent comme une agression personnelle le simple énoncé d'une loi objective. Cependant, la fonction de la justice ne consiste-t-elle pas précisément à régu­ler ce traitement de la culpabilité, en évitant que le jugement soit une source d'exaspération ?
Je ne suis pas sûr que le rôle que l'on fait jouer à la justice à travers les représentations médiatiques soit de nature à apaiser ce risque d'exaspération. En effet, il semble devenu évident pour beaucoup que la fonction du jugement est d'apporter une satisfaction particulière à la victime. C'est au point qu'il lui est souvent demandé après le jugement si elle pense en avoir eu assez et si la sentence a été assez forte pour apaiser son désir de vengeance. La tentation de faire monter la pression par ce biais médiatique risque de tirer l'acte du jugement dans une dimension qui n'est pas celle pour laquelle il a été institué, et qui consiste précisément à faire échap­per les relations sociales à la vengeance privée.
Il ne s'agit évidemment pas d'oublier les victimes, ni de féliciter les coupables. Mais nous devons comprendre qu'il ne peut y avoir de société paisible si la satisfaction est livrée au ressentiment et si elle est abandonnée à la violence de la rancune. Le signe d'une société civilisée est précisément de retirer aux particuliers la capacité de venger le crime dont ils ont été victimes ou les dégâts qu'ils ont subis. Nous savons combien de siècles de civilisation ont été nécessaires pour que cette fonction soit ainsi régulée. Il ne revient pas à chacun de faire sa justice. C'est à la société d'assurer les conditions de la justice, de telle façon que le mal soit condamné mais que le malfaiteur ne soit pas exaspéré, qu'il ne soit pas mis dans une situation telle que la seule issue possible soit celle du désespoir, et qu'il soit acculé à ajouter le mal au mal.

La barbarie toujours latente

La médiation exercée par la justice garantit que les rapports dans une société démocratique ne sont pas régulés par la violence. Mais nous savons que la bar­barie est toujours latente et la régression toujours pos­sible. Nous voyons également que la surenchère trouve toujours des supporters et ce que la volonté de montrer la force peut déclencher de violence. Il n'est pas si facile de vivre paisiblement. Il est délicat de trouver le sage équilibre entre la nécessaire défense du droit et l'excessif accablement du coupable.
Chacun de ceux à qui la société dévolue la noble fonction de l'exercice de la justice doit pouvoir s'inter­roger : « Qui serais-je pour juger mon frère si mon jugement n'était que ma décision personnelle ? Comment assumer une telle responsabilité si elle n'est pas elle-même portée et définie par le pacte social ? » Le juge exerce donc sa fonction dans une certaine dépossession garantie par le droit, et avec la conviction que le progrès de la société ne repose pas sur l'exas­pération des hommes mais sur la sérénité dans laquelle ils peuvent accéder à un jugement prudent.
En ce jour, nous pensons à toutes celles et à tous ceux dont le métier et la mission consiste à contribuer à cet acte si important pour la paix sociale. Nous prions pour eux et nous prions aussi pour celles et ceux qui n'ont pas encore découvert que la vie en commun sup­pose que la vengeance soit désappropriée des individus pour être assumée dans le jugement de la société.

Pour un authentique débat démocratique

À quoi bon vivre ? Ce pourrait être une façon de comprendre l'imprécation de Job sur qui se sont abat­tus des malheurs de toute sorte. La figure de Job a conduit la révélation juive à faire un pas considérable dans l'intelligence de la condition humaine. On trouve en effet d'abord là un essai pour attribuer la respon­sabilité des malheurs de l'humanité à un tiers. Or ce n'est pas Dieu ni l'homme qui sont responsables de ces malheurs. Tout juste Dieu laisse-t-il au Mauvais la possibilité d'éprouver la foi de Job. D'autre part, ce texte traduit de façon magistrale l'expérience du drame humain de la souffrance : comment comprendre et expliquer cette avalanche de catastrophes qui frappent Job dans ses biens et dans ses êtres les plus chers ?
Sa première réaction, rapportée par notre lecture, exprime à la fois l'incompréhension et la révolte devant
les fléaux qui frappent l'humanité : « Pourquoi donner la vie à l'homme qui ne trouve plus aucune issue ? » Pour nous, comment ne pas sentir une véritable conni­vence avec ce cri de désespérance ? Cet accablement devant les malheurs de l'humanité, ce sentiment de lut­ter contre l'inévitable, cette désespérance de ne jamais pouvoir surmonter le mal ont été de tous les temps un des éléments de la dramaturgie humaine.
Aujourd'hui, alors que les efforts et les progrès de l'humanité ont permis de vaincre un certain nombre de fléaux, la persistance des malheurs, du moins pour la plus grande part de l'humanité, rend encore plus tra­gique notre impuissance à les réduire. Comment nous étonner alors des tendances morbides et mortifères qui traversent nos sociétés, y compris les mieux protégées et les plus prospères ? Naguère, Jean-Paul II a parlé d'une culture de mort. C'est bien ce que nous décou­vrons dans le dégoût de nombre de nos contemporains.
Cette culture de mort s'attaque aux plus faibles de notre univers. C'est évident. Mais elle ronge aussi l'âme des plus forts. Les auteurs de la violence, phy­sique ou verbale, individuelle ou collective, réelle ou virtuelle, sont aussi embarqués dans le jeu de la mort. Le bourreau et la victime sont les deux faces d'une même horreur.
La suite du livre de Job montrera comment sa fidé­lité à Dieu lui permet de surmonter l'épreuve sans l'esquiver ni en réduire les effets. Un chemin d'intel­ligence nous est ainsi ouvert pour guider notre compor­tement dans les situations les plus difficiles. Mais, sur ce chemin, ni le simplisme ni l'échappatoire n'ont cours ni raison. La fidélité à Dieu et à sa volonté ne peut s'accommoder d'une gestion des obstacles par l'illusion ou le miracle facile. Le petit dialogue que nous venons d'entendre entre Jésus et ses disciples nous en donne un bon exemple.
Le refus manifeste de ce village de Samaritains, nous le qualifierions aujourd'hui d'idéologique : ils ne veulent pas de Jésus parce qu'il est en route vers Jérusalem et que les Samaritains ne veulent rien avoir à faire avec les gens de cette ville-là, dont ils se sentent méprisés. Mais, en fait, ce refus de recevoir le Christ qui monte vers Jérusalem a un autre sens, plus profond. Il rejoint l'admonestation que Pierre a faite au Christ en refusant qu'il aille vers la mort1. C'est le refus de la véritable mission du Messie. Aux résistances rencontrées, Jacques et Jean proposent une solution radicale : l'exter­mination de ce village et de ses habitants par « le feu du ciel », à quoi Jésus s'oppose vivement.

Le bon grain et l'ivraie

Cette dissension entre Jésus et ses disciples reflète l'incompréhension où ceux-ci sont encore de la véri­table nature et de la mission du Messie. Leurs rêves sont encore ceux d'un Messie triomphant qui pulvérise ses adversaires et établit la justice par la force. Ils n'ont pas encore compris ce qu'enseigne la parabole du bon grain et de l'ivraie2 et qui donne la clé d'interprétation et l'orientation de la mission de l'Église dans les temps de l'Histoire. Comme le maître du champ, nous devons supporter que l'ivraie pousse en même temps que le bon grain et que le tri et le jugement soient réservés à Dieu lui-même au terme de l'histoire des hommes. Comme Job a dû apprendre à vivre sa fidélité dans les traverses de l'existence, comme Jésus accomplit sa mission au milieu de l'hostilité et en la supportant jusqu'à la mort incluse, chaque disciple du Christ est invité à affronter et à assumer les incerti­tudes des temps.
L'Évangile nous dit que le temps était venu pour Jésus de monter à Jérusalem, d'affronter l'adversité et d'être enlevé de ce monde. Il nous précise aussi dans quelle disposition il se met en route : avec courage. Et c'est une traduction très affadie d'une formule plus éloquente, que l'on pourrait rendre littéralement par : « en durcissant son visage comme de la pierre ». Il ne s'agit pas ici d'un stoïcisme affecté, mais d'une réso­lution délibérée de ne pas échapper à l'épreuve vers laquelle il marche.
Comment cette confrontation au mal, à sa persis­tance dans le tissu de l'histoire humaine, et le chemin emprunté par Jésus éclairent-ils notre propre condi­tion ? Celui ou celle qui choisit de s'engager dans la gestion des affaires publiques sait par expérience qu'il s'engage dans une aventure où le bien et le mal sont sans cesse inextricablement mêlés. Le régime totali­taire solutionne la question en définissant la vérité sans débat. Un des mérites des régimes démocratiques est précisément de favoriser et d'arbitrer le débat néces­saire à la vie publique sur les options fondamentales et leurs mises en œuvre pratiques. Encore faut-il que ce débat obéisse à quelques règles élémentaires, qui sont nécessaires à une vie sociale civilisée.
Permettez-moi d'en évoquer quelques-unes.
L'instance ultime et impérative des grandes orien­tations du pays, ce sont les élections. Le raccourcis­sement du mandat présidentiel à cinq ans permet de renouveler plus vite ce jugement populaire. Les votes libres sont des biens trop précieux pour qu'on en déva­lue la valeur par une espèce de revanche au forcing.
Le débat légitime sur des décisions importantes de la vie publique - et Dieu sait que nous n'en manquons pas ! - doit être un débat sur des hypothèses ou des projets avant d'être une attaque de celles et de ceux qui défendent ces hypothèses ou ces projets jusque dans leur dignité personnelle. La tentation de transpo­ser des questions pratiques vers un débat idéologique risque toujours de reconstituer des guerres de religion dont on espère que la laïcité de l'État nous protège.
La surenchère verbale suscite et encourage la perver­sion de certaines dérives médiatiques qui semblent aujourd'hui confondre information et exhibition de polémiques. Beaucoup, même parmi les esprits les plus résistants, cèdent trop facilement à la sollicitation de réagir sur des citations partielles, tronquées ou même déformées. Un fonctionnement sain de la démocratie supposerait plus d'esprit critique et de sang-froid. Trop de monde espère faire tomber « le feu du ciel » sur ses adversaires. Trop de monde transforme ses adversaires en ennemis indignes de vivre ou de parler.

Retrouver à quoi bon vivre

Les graves questions auxquelles vous êtes confron­tés dans vos engagements politiques et votre service du bien public méritent mieux que ces emballements périodiques. Pour certaines d'entre elles, comme la réforme des retraites, elles engagent l'avenir de nos concitoyens pour plusieurs décennies et elles mettent en œuvre des conceptions et des pratiques de la soli­darité nationale qui méritent bien d'être débattues. Pour d'autres, comme la révision des lois de bio­éthique, elles engagent toute une conception de la dignité humaine et du respect qui doit lui être accordé à tous les stades du développement de la personne. Les longues consultations et les débats des États Géné­raux ont montré que beaucoup de nos concitoyens sont sensibles à l'enjeu de cette révision et qu'ils ne sont pas dupes des slogans les plus volontiers véhiculés sous la pression des lobbies. À travers ces questions, c'est toute une conception de l'homme qui est enga­gée, ainsi que notre responsabilité à l'égard des droits imprescriptibles des personnes, surtout de celles qui sont fragilisées dans leur santé ou par leur situation d'immigrés.
Enfin, permettez-moi d'espérer encore que la grave crise économique et financière dont nous continuons de subir les effets aide à poser la question culturelle fondamentale, même si beaucoup feignent de ne pas la voir et de passer outre : comment faire évoluer notre système économique et social pour qu'il ne repose plus sur le seul dynamisme de la consommation dont les spirales n'ont été que trop dommageables ? On ne peut plus faire reposer notre système collectif sur des promesses de croissance permanente. On ne peut plus imaginer de préserver notre niveau de consommation en oubliant le reste de l'univers. Les récents débats des Nations-Unies ne peuvent pas rester une simple déclaration d'intentions généreuses. Ils doivent passer de plus en plus dans les décisions et les applications.
À quoi bon vivre ? Si nous voulons que la déses­pérance de vivre ne ronge pas notre société, si nous voulons que l'abattement devant les difficultés incon­tournables de l'existence ne se résolve pas dans la vio­lence aveugle, si nous voulons que notre jeunesse regarde l'avenir avec espoir, il nous faut impérative­ment maintenir et développer les conditions d'un authentique débat démocratique qui permette de mettre en œuvre un projet de société clair et généreux. Celles et ceux qui en ont la charge et la responsabilité savent, par expérience, que cette mission est semée d'embûches et qu'ils doivent, eux aussi, « durcir leur visage comme de la pierre » pour ne pas succomber à la tentation de faire tomber « le feu du ciel ». L'endurance n'est pas indifférence, elle est participa­tion à la patience de Dieu qui espère toujours la conversion des cœurs. Elle est espérance qu'il y a quelque chose à faire pour améliorer ce monde et que nous devons le faire, que nous pouvons le faire.

Anticipation de l'avenir et équité sociale

Notre pays est traversé par une crise résultant des blocages de notre société dans les modalités du dia­logue social. Il ne nous appartient pas de définir les solutions politiques et techniques des questions soule­vées à propos de la réforme des retraites. Mais nous pouvons essayer de formuler quelques réflexions sur les enjeux et les débats qui concernent l'ensemble de notre corps social.

Des difficultés prévisibles

Je voudrais d'abord rappeler que, dans les années écoulées, nous avons déjà eu l'occasion de souligner certains risques qui menacent une société dont le prin­cipal ressort économique est la consommation.
C'est à la lente transformation des attentes et des requêtes de nos contemporains que nous devons travailler sans relâche. Nous devons avoir le courage de leur dire que notre mode de vie actuel ne pourra pas être préservé sans grave dommage pour l'avenir : dommage écologique, mais aussi dommage financier des dépenses faites sur le compte des générations futures, misère culturelle et misère affective'.
Si la redistribution des revenus et des richesses peut séduire par son intention généreuse, nous ne pouvons pas éluder une question beaucoup plus radicale, qui est celle de notre modèle de société. Partager des richesses est une attitude altruiste, mais le moment vient où nous devons prendre en compte les limites des richesses à partager. Comment pouvons-nous aider nos contemporains à inté­grer dans leurs attentes le fait que notre planète n'est pas un réservoir indéfini de consommation possible ?2
Ce qui est en cause, c'est la logique même de notre fonc­tionnement économique dont le dynamisme repose sur l'expansion indéfinie des revenus et de la consommation. Imaginer que cette consommation puisse être assurée par la seule répartition des fonds publics est un leurre et une trom­perie. Jusqu'à présent, notre pays n'a pas encore été touché aussi fortement que d'autres, mais nous sommes encore loin de la sortie de la crise. Déjà en 1982, notre conférence appe­lait de « Nouveaux modes de vie ». C'est à de nouveaux modèles que nous devons travailler : nouveau modèle de production agricole, nouveau modèle de développement éco­nomique, nouveau modèle d'échanges avec les pays pauvres, nouveau modèle de gestion des ressources naturelles3.
Beaucoup de nos contemporains commencent à com­prendre qu'une société plus juste et plus respectueuse de son environnement est nécessaire. Ils comprennent aussi que l'usage plus raisonnable des biens de ce monde appelle à une révision courageuse de nos modes de vie. Il ne s'agit plus seulement de militer pour des thèses vague­ment écologistes. Le moment est venu de réfléchir et de décider comment réduire la consommation toujours crois­sante, souvent au détriment de pays moins développés qui subissent les dommages de notre traitement de la nature1.
J'ai choisi de reprendre, parmi d'autres, ces quatre extraits de nos sessions des années écoulées pour rap­peler que les difficultés rencontrées aujourd'hui n'étaient pas tout à fait imprévisibles. En effet, la réforme des retraites impose des changements dans la solidarité intergénérationnelle et ces changements s'inscrivent dans une évolution plus globale de nos modes de vie. Un certain nombre de responsables poli­tiques y ont travaillé depuis des décennies, sans pou­voir aboutir aux décisions structurelles souhaitables. Faute que tous les partenaires se soient engagés fer­mement à temps dans les réformes nécessaires, nous nous retrouvons devant un blocage du dialogue social dont notre pays fait trop souvent l'expérience quand il est confronté à des décisions importantes.

Porter les souffrances et les espérances

Le débat récent pose simultanément des questions qui touchent à l'équité sociale et à une certaine anti­cipation de l'avenir. Beaucoup de nos concitoyens comprennent mal que la précarité du travail et des revenus, présents et futurs, frappe une partie impor­tante de notre société, tandis qu'une autre jouit de la sécurité de l'emploi et d'avantages économiques et financiers sans rapport avec les risques qu'ils prennent.
D'autre part, la réforme des retraites pose brutalement la question de l'avenir et de la solidarité entre les géné­rations. Comment l'anxiété ne s'exprimerait-elle pas quand on est confronté à la réalité brute : qui prendra en charge les nombreux centenaires de demain ? Cette anxiété sur l'avenir n'est pas non plus exempte d'un certain sentiment de culpabilité. Comment notre société a-t-elle assumé ses responsabilités dans la transmission de la vie et du patrimoine ? A-t-on tant sacrifié au tra­vail, y compris les équilibres humains et familiaux, pour se retrouver sans garanties humaines à la fin de sa vie ?
Enfin, les plus jeunes générations ne peuvent pas éliminer purement et simplement la question de leur propre avenir : à quoi bon une scolarité longue et cou­ronnée de diplômes, si cette formation de haut niveau ne débouche que très difficilement sur une insertion professionnelle et sociale, ou si l'existence est grevée de charges héritées des générations précédentes ? Vers quelle existence les conduit notre société ?
Il n'est donc pas vraiment étonnant que ce senti­ment d'injustice, cette inquiétude pour l'avenir et l'anxiété des jeunes nourrissent des expressions de ten­sion collective et parfois de violence. Une société démocratique suppose un pacte de confiance entre les partenaires, y compris quand ils divergent sur les solu­tions politiques à mettre en œuvre.
Par ses mouvements, par ses services, par l'impli­cation personnelle de ses membres, notre Église est présente et active dans tous les domaines de la vie sociale et politique. Les souffrances et les espérances des hommes sont portées par beaucoup de chrétiens que nous rencontrons souvent et que nous encoura­geons dans leurs engagements. Ils sont éclairés par diverses analyses d'institutions religieuses ou sociales, comme, par exemple, le rapport du médiateur de la République au début de l'année civile.

La cohérence du principe d'humanité

Ces dernières semaines ont été obscurcies par les violences dont sont victimes les chrétiens du Moyen-Orient en particulier. Ces violences ont suscité de nombreuses et sincères réactions. Mais au-delà de l'émotion, qui pourrait être sans lendemain, il convient d'affirmer avec vigueur que la liberté religieuse est la fine pointe de la liberté humaine. Quand elle est bafouée, c'est le principe d'humanité lui-même qui est gravement remis en cause.
Au-delà de la liberté religieuse comme telle, ces violences homicides ont eu un retentissement particu­lièrement brutal, mais aussi, en un sens, salutaire. Depuis quelques jours, les réactions à l'assassinat de Vincent Delory et Antoine de Léocour montrent que nous ne saurons jamais nous habituer aux forces de mort qui ensanglantent notre monde jour après jour. L'horreur du mal réveille notre attention au principe d'humanité, qui devrait être sans compromis.
C'est ce même principe d'humanité qui est en jeu dans les débats éthiques qui s'engagent dans notre pays. Après le long processus des « états généraux », qui, à bien des égards, a mis en lumière le sens des responsa­bilités de nos concitoyens, la phase législative de la révi­sion des lois de bioéthique commence. Par ailleurs, le Sénat va devoir se prononcer à nouveau dans quelques jours sur plusieurs propositions de loi visant à délivrer ce qu'il faut bien appeler un « permis de tuer ».
L'humanité d'une société, la qualité de sa civilisa­tion se mesure à la manière dont elle traite les plus vulnérables : les enfants, les exclus de toute sorte mais aussi les malades en fin de vie ou les êtres humains au tout début de leur histoire.
La recherche sur l'embryon n'est pas seulement une question, scientifique. Le « diagnostic préimplanta-toire » n'est pas la chasse gardée de quelques spécia­listes. De même, l'accompagnement des grands malades concerne toute la société. Ce qui est en jeu, c'est le respect imprescriptible de la dignité humaine. Ne pas reconnaître cette dignité, par un manque de lucidité ou de sérieux, c'est immanquablement faire le jeu destructeur de la violence.
Dire cela, ce n'est pas s'opposer à la démarche scientifique. C'est au contraire affirmer, par respect pour la science elle-même, qu'elle peut et qu'elle doit intégrer le principe d'humanité. C'est aussi demander que l'effort scientifique authentiquement humain soit plus vigoureux et mieux organisé.
Des résultats sérieux semblent montrer que la recherche sur les cellules souches adultes ou repro­grammées est la voie des véritables découvertes thé­rapeutiques : notre pays ne devrait-il pas concentrer ses énergies sur ces recherches et devenir davantage une terre d'excellence dans ce domaine ? De même, la prise en charge médicale de la douleur a beaucoup progressé depuis quelques années et les soins palliatifs ont inauguré une nouvelle forme de rapport aux malades et à leur environnement : quels sont les moyens à mettre en œuvre aujourd'hui pour progresser aussi bien dans le traitement de la souffrance que dans l'accompagnement social des pathologies les plus lourdes et de la dépendance ?
Se laisser aller à la tentation de l'eugénisme, en stigmatisant qui plus est la population déjà fragile des personnes trisomiques et de leurs familles, considérer la recherche sur l'embryon, avec les destructions qui l'accompagnent, comme normale, voire nécessaire, céder aux pressions financières et commerciales qui se cachent parfois sous le masque d'un scientisme naïf, ne rien offrir d'autre que la mort aux malades qui attendent de l'aide, serait à proprement parler suici­daire pour notre société.

Le moins-disant éthique n'assurera pas la cohésion sociale

Pour nous catholiques, qui avons tenu à participer dans un esprit de dialogue au débat pluraliste qui s'est engagé depuis plusieurs années sur ces sujets, mais qui sommes aussi sensibilisés par notre foi et par la tradition biblique à la dignité de l'homme et de la femme « créés à l'image de Dieu », ne pas dénoncer cette tentation suicidaire serait de la non-assistance à société en danger.
Des responsables politiques et des intellectuels d'ins­pirations variées ont d'ailleurs exprimé la même préoc­cupation il y a quelques semaines en dénonçant la « gestation pour autrui » comme « extension du domaine de l'aliénation». Pas de liberté sans respect du principe d'humanité. C'est parce que l'homme n'est pas seulement une réalité biologique qu'il est libre. S'autoriser à bafouer sa dignité au nom d'une préten­due liberté constituerait une contradiction meurtrière.
La culture de notre pays, son histoire, sa responsa­bilité vis-à-vis de l'Europe et du reste du monde, sa fragilité actuelle aussi, nous engagent à faire preuve d'ambition éthique, avec courage et enthousiasme. Il serait illusoire de confondre plus petit commun déno­minateur éthique et cohésion sociale. Car seule une haute vision de l'homme permet de construire la paix. Le consensus qui prétendrait se fonder sur le moins-disant éthique serait en fait une caricature sans lende­main.
Il y a un message universel, que tous peuvent accep­ter : la solidarité et la paix proviennent du respect inconditionnel de toute vie humaine, dans sa plénitude et dans sa beauté comme dans sa fragilité et sa part de souffrance.

Vers quelle société voulons-nous progresser ?!

La révision de la loi de bioéthique a été préparée par un vaste débat national avec les « états généraux » et les
nombreuses contributions qui ont jalonné le par­cours. Ce long processus aboutissait à des positions relativement équilibrées, dont le vote des députés en première lecture était le reflet. Si tant de personnes se sont impliquées avec conviction dans ce débat, c'est sans doute parce que nous percevons bien que, par le biais de décisions apparemment techniques, s'exprime un choix de civilisation. Vers quelle société voulons-nous progresser ?
Malheureusement, si les modifications introduites dans le projet de loi par le Sénat étaient entérinées par l'Assemblée nationale, une certaine conception de l'être humain serait très gravement compromise.
En effet, la levée de l'interdiction habituelle des recherches provoquant la destruction des embryons humains ouvrirait largement le champ à une instrumentalisation de l'être humain, au moment même où la Commission européenne travaille à la protection des embryons des animaux, ce qui constitue un sinistre paradoxe ! Est-il besoin de rappeler que les résultats scientifiques enregistrés à ce jour devraient plutôt sti­muler d'autres pistes de recherche aujourd'hui moins encouragées bien que leur efficacité soit vérifiée ? Autre paradoxe étonnant ! Faut-il donc imaginer que des lobbies économiques évaluent que la recherche sur l'être humain est plus rapide et moins coûteuse que les expérimentations animales ? Où irions-nous avec ces seules évaluations ? N'y a-t-il pas d'évaluation éthique de la recherche ?
De plus, la systématisation juridique du diagnostic prénatal nous conduirait inévitablement à un eugé­nisme d'État. Quel message adresserions-nous ainsi aux personnes handicapées que nous affirmons vouloir respecter et intégrer dans la société ? Quel signal donnerions-nous à leurs familles ? Leur dirons-nous que la solution idéale eût été que leurs enfants n'aient pas vu le jour ? Et pourquoi ne pas consacrer les sommes considérables que l'on engloutirait dans ce dépistage systématique pour financer la recherche, en particulier concernant la trisomie 21 ?
lequel nous serons acheminés. Les plus faibles et les plus vulnérables y auront-ils encore leur place ? Le respect inconditionnel de l'être humain vaut mieux que des démissions peu réfléchies et peu courageuses qui font reculer notre civilisation en la poussant vers des choix extrêmes.

Un recul de la civilisation ?

Ces questions seront sans doute évitées dans la pro­chaine campagne électorale. Pourtant, des réponses que nous y apportons aujourd'hui dépend le type de société que nous préparons pour nos enfants et vers lequel nous serons acheminés. Les plus faibles et les plus vulnérables y auront-ils encore leur place ? Le respect inconditionnel de l' être humain vaut mieux que des démissions peu réfléchies et peu courageuses qui font reculer notre civilisation en la poussant vers des choix estrêmes.

Dominer les passions

Le déjeuner de Jésus chez Simon le Pharisien, dans la page de saint Luc qui vient de nous être lue, fait ressortir ce qu'en
d'autres passages des évangiles Jésus désigne comme l'hypocrisie des Pharisiens, c'est-à-dire la déformation qui les conduit à privilégier la rectitude formelle et extérieure par rapport à la jus­tice du cœur. Tous, nous sommes tentés par ce risque d'accorder plus d'importance à ce qui se voit qu'à ce qui reste caché dans le secret de notre conscience. Dans notre période actuelle, ce risque doit être analysé finement, puisque beaucoup des discours publics par lesquels des candidats sollicitent les suffrages des élec­teurs sont souvent soupçonnés de cacher leurs véri­tables convictions.
Pour expliquer l'écart ou l'opposition entre l'inté­rieur et l'extérieur, entre la conscience et le discours, nous ne voulons pas ici parler d'une quelconque volonté perverse ou cynique de cacher le réel. Cepen­dant, nous savons qu'aucune communication humaine n'échappe à cette médiation du visible, de l'extérieur, pour manifester l'invisible, l'intérieur. Nous faisons chaque jour l'expérience des risques auxquels ce prin­cipe nous expose, mais nous faisons aussi chaque jour l'expérience de notre capacité à surmonter ces risques et à trouver les chemins d'une véritable sincérité et de la vérité.
C'est là la grandeur de l'homme ! Rien dans notre communication ne relève de l'automaticité et tout repose sur l'intervention de notre liberté pour exprimer le mieux possible ce que nous voulons vraiment trans­mettre. C'est notre grandeur également parce que cette part incontournable de notre liberté fait reposer la communication sur la confiance. Une parole publique suppose toujours un engagement de celui qui parle.

Cohérence entre ce que l'on propose et ce que l'on croit

C'est pourquoi la multiplication et l'accélération des techniques de communication appellent une discipline plus rigoureuse de ceux qui ont accès à l'expression publique. Aujourd'hui, la confusion entretenue entre les rumeurs, les soupçons, les dénonciations ou les faits avérés et soumis à une enquête judiciaire permettent de déclencher des mouvements d'opinion à partir de simples SMS ou de messages sur Facebook ou Twitter. La surenchère et l'emballement rendent illusoires les vérifications et poussent la vie sociale à se transformer en tribunal permanent à ciel ouvert. La confiance y perd beaucoup : la confiance dans des personnes dont l'intégrité et la sincérité sont perpétuellement contes­tées ; la confiance dans des moyens d'information dont la déontologie est soupçonnée. Il y a peu de chance que la démocratie gagne à ce jeu. Il y a peu de chance que les débats y gagnent en qualité.
Or, l'éclatement des conceptions du monde, comme la gravité de la crise financière que nous traversons, suscite chez beaucoup le désir d'entendre des propos qui affrontent réellement les difficultés ,ët qui tentent d'organiser une vision cohérente des actions à mener. La situation est assez cruciale pour [que l'on ne se contente pas de flatter des clientèles.!
Ces quelques réflexions sur la parole publique ne rendent que plus aiguë la question préalable de la cohérence entre ce que l'on propose et ce que l'on croit. Dans les périodes de crise comme celle que nous connaissons, c'est évidemment la force de caractère et l'intégrité qui vont faire apparaître les hommes et les femmes capables d'affronter réellement la situa­tion. Cette force de caractère et cette intégrité ne se gagnent pas sur les estrades. Elles sont le reflet d'une droiture de vie et d'un engagement profond pour les causes que l'on veut défendre. Elles se signalent, dans les périodes extrêmes, par la liberté personnelle capable de résister, non seulement aux actes délictueux, mais aussi aux arrangements latéraux qui ménagent toutes les issues.
En donnant Thomas More comme patron aux res­ponsables politiques, le bienheureux pape Jean-Paul II
a voulu exalter la « dignité inaliénable de la conscience ». Cette capacité libératrice a permis à saint Thomas More de résister et de refuser toute compro­mission, malgré les pressions. Cette fidélité à la voix de sa conscience lui coûta la vie : il mourut martyr, c'est-à-dire témoin. Il revendiqua au nom de sa conscience le droit de résister à des mesures qui lui paraissaient aller à rencontre du patrimoine moral et juridique sur lequel était fondé le droit de l'État1.
Plus près de nous, au cours du xxe siècle, des hommes et des femmes ont payé de leur vie leur volonté de respecter une certaine conception de l'homme. Grâce à Dieu, nous ne sommes pas dans un système totalitaire et la diversité des opinions ne se règle pas par des exécutions. La liberté de conscience et de choix à laquelle nous sommes légitimement atta­chés nous oblige donc à une plus grande gravité devant les options qui marquent la vie de tant de nos contemporains. Cela est vrai de l'organisation de la vie économique et financière dont les effets se font sentir avec tant de force en ce moment. C'est vrai aussi de l'organisation de la vie sociale : toutes les décisions qui touchent au respect de l'être humain et au soutien à la famille sont des décisions qui ne peuvent se réduire à satisfaire des attentes particu­lières. Le Conseil permanent des évêques de France a publié récemment un texte qui souligne quelques-uns
  1. Thomas More (1478-1535), chancelier du roi d'Angleterre Henri VIII, fut exécuté pour avoir, en conscience, refusé de recon­naître le souverain comme chef de l'Église nationale séparée de Rome.
  2. des ces thèmes et je ne doute pas qu'il sera lu avec attention et profit1.
La loi de la conscience et de la raison

Pour terminer, je voudrais inviter à méditer quelques instants sur le début de l'épître aux Romains dont nous avons entendu quelques versets. Isolés de l'ensemble du raisonnement de saint Paul, ils peuvent nous paraître très durs à entendre et à comprendre, et évo­quer une condamnation universelle de toute l'humanité. En fait, ils annoncent une espérance extraordinaire. Les païens, comme les juifs, sont soumis au jugement de Dieu. Ils ne sont pas jugés en fonction de la Loi juive qu'ils n'ont pas reçue, mais en fonction de leur conscience. « Depuis la création du monde, les hommes, avec leur intelligence, peuvent voir, à travers les œuvres de Dieu, ce qui est invisible : sa puissance éternelle et sa divinité. » Nous voici ramenés à l'universalité de la conscience qui définit la capacité morale de tout être humain, qu'il soit déjà entré dans la grâce de la Révé­lation ou qu'il y soit encore étranger. Car il y a une révélation plus intime que la révélation historique : c'est le message de l'intelligence quand elle se laisse conduire par l'appel à une conduite juste.
La connaissance du bien et le désir de bien vivre ne sont pas une exclusivité des croyants. C'est un don que Dieu fait à tout homme par toutes sortes de signes - naturels dans la création ou historiques à travers la vie sociale. Cette espérance que nous portons et que nous annonçons, malgré notre faiblesse, nous rend capables de faire confiance à l'intelligence humaine et de nous adresser à la droite raison pour inviter nos semblables à choisir ce qui est meilleur pour l'homme. Nous ne le faisons pas en nous appuyant sur une foi, qu'ils n'ont pas ou qu'ils refusent, mais en faisant appel à la conscience morale de tout être humain. C'est pourquoi nous, chrétiens, nous nous employons toujours à chercher le dialogue et à proposer des che­mins raisonnables pour défendre des objectifs que, pour notre part, nous avons découverts grâce à la foi.
C'est dans l'espérance que cette capacité humaine de l'intelligence peut dominer les passions que nous faisons confiance à la rencontre et même à la confron­tation. Prions pour que cette espérance ne soit pas déçue au cours des mois qui viennent et pour que le débat démocratique ne cherche pas à solliciter les pas­sions, le mépris ou la haine, mais plutôt la raison et le meilleur de la conscience humaine.

Risques et enjeux

Cette assemblée s'ouvre dans un climat européen assez sombre. Beaucoup de nos concitoyens sont saisis par une réelle inquiétude pour leur avenir. Aussi, il me semble bienvenu que nous puissions commencer nos travaux par un retour en forme d'action de grâce sur ce que nous avons vécu cet été avec les Journées Mondiales de la Jeunesse qui se sont justement dérou­lées en Europe2 alors que la crise continuait de faire sentir sa pression. [...]
Il me semble que, à travers cette forte expérience spirituelle des jeunes, notre Église en France peut se féliciter du signe qui est ainsi donné à nos concitoyens. Dans un climat d'incertitude sur l'avenir, la mobilisa­tion forte de cinquante mille jeunes constitue une espé­rance pour notre Église, et, plus largement, elle dit quelque chose sur la jeunesse de notre pays. Elle mani­feste que cette jeunesse n'est pas sans ressource ni sans capacité d'engagement. Dans une société vieillissante ,nous voyons qu'il y a de nouvelles forces pour construire la société de demain.
Mais nous devons aussi entendre les questions de ces jeunes, qui sont bien éloignées, des débats des générations précédentes. Nos générations ont connu un certain besoin de s'émanciper d'institutions qu'elles jugeaient trop contraignantes. En retour, les généra­tions nouvelles expriment souvent une sorte de désar­roi intérieur. Elles craignent de n'avoir pas reçu par leur éducation les éléments nécessaires à la structura­tion de leur personnalité. C'est pourquoi nous ne devons pas trop vite qualifier d'« identitaires » leurs recherches de certitudes et de signes d'appartenance. Il nous faut prendre le temps et les moyens de chercher à répondre à ces attentes nouvelles, en comprenant mieux la culture qui se fait jour, marquée entre autres par Internet et par les réseaux sociaux. [...]

Un vent de crise

La crise européenne que nous traversons n'est pas simplement, comme certains le disent parfois, une crise de la gouvernance qui se résoudrait par des alter­nances démocratiques, ni une crise de la distribution des revenus dont on sortirait en réduisant quelques salaires scandaleux. C'est véritablement une crise du système. Je l'ai dit ici et ailleurs à plusieurs reprises, et je n'y reviens pas davantage aujourd'hui. Mais puisque nous entrons en campagne électorale, il me paraît juste de le souligner pour tenter de cerner, à partir de là, quelques-uns des risques et des enjeux de cette campagne. La déclaration du Conseil permanent, «  Élections : un vote pour quelle société ? » a déjà fourni des éléments de réflexion que je ne fais que compléter.
Le premier risque, qui n'est pas illusoire si nous comprenons ce qui se passe depuis quelques semaines, serait de croire que l'enjeu des élections à venir est de choisir simplement un homme ou une femme, et de se laisser enfermer dans une sorte de comparaison des personnalités. L'opposition à une politique, la contestation des aptitudes de l'un ou l'autre candidat sont légitimes et peuvent contribuer au débat démo­cratique. Mais en revanche, les agressions sur l'inté­grité ou les intentions des personnes débouchent sur la haine et le mépris. Il n'y a pas de démocratie sans un véritable respect des adversaires et un jugement honnête de leurs actes ou de leurs propositions.
Le second risque serait de nourrir l'illusion que, dans la crise actuelle, un programme, si élaboré et si sérieux soit-il, viendra facilement à bout des difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Imaginer cela, c'est compromettre la confiance que l'on doit avoir dans les élus, et les encourager à promettre l'impos­sible. Nous ne sommes pas dans une situation où quelques faveurs fiscales ou quelques financements exceptionnels pourraient changer durablement la donne économique. Il convient que les hommes et les femmes politiques affrontent leur mission avec lucidité et franchise, pour que nous puissions espérer sérieu­sement qu'ils l'accomplissent avec succès. Ce serait mépriser les électeurs que de leur faire croire que tout va s'arranger moyennant quelques corrections à la marge. Celles et ceux qui vont briguer nos suffrages doivent avoir déjà le courage politique de dire clairement les contraintes de l'avenir, et de montrer qu'ils sont résolus à affronter les insatisfactions.
Le troisième risque serait de laisser croire que nous pouvons indéfiniment continuer de vivre à crédit. En accumulant les déficits et le poids de la dette, qui obère les investissements pour l'avenir, on consom­mera les chances des jeunes générations et on mettra sur leurs épaules un fardeau insupportable. Même si nous savons que la consommation est un des leviers de la croissance, nous ne pouvons pas continuer à lais­ser dépendre toute l'activité économique d'une énième relance de cette consommation par l'aggravation de la dette publique. Il ne suffit pas d'appeler à de nouveaux modes de vie. Il faut que nous ayons tous le courage de mettre en œuvre ces nouveaux modes de vie et que nous apprenions à donner le signe d'une consomma­tion plus raisonnable et plus équitable. Grâce à Dieu, de nombreuses initiatives d'entrepreneurs commencent à aller en ce sens. Et il est important de rappeler que si la dette publique de la France est très élevée, le taux de l'épargne privée y est aussi particulièrement haut. Ce n'est pas le moindre paradoxe, mais cela signifie que notre pays a des ressources économiques et humaines pour investir de nouveaux chantiers, même si ceux-ci ne sont évidemment pas sans risques.
Enfin, nous voyons que les tentations de repli et de fermeture de l'Europe ne sont pas imaginaires. Non seulement nous sommes tentés de rejeter à la mer (hélas ! il ne s'agit pas seulement d'une image) ceux qui viennent chez nous poussés par la misère, mais nous sommes même tentés de laisser certains pays européens sombrer pour sauver notre fragile équilibre. Qu'il existe des mesures nécessaires pour aider au développement des pays pauvres ou pour améliorer la gestion de certains pays d'Europe est une chose. Que la solution soit de fermer nos portes pour préserver notre petite zone de relative prospérité en est une autre. Veillons à ne pas nous laisser entraîner dans la spirale de l'égoïsme, de l'isolationnisme ou de la xénophobie. Comme l'a rappelé récemment avec force le document du Conseil pontifical Justice et Paix, les solutions sont à chercher dans la concertation interna­tionale et la mise en place d'instances de régulation fiables1.

Chrétiens dans ce monde

C'est dans ce contexte difficile que nous sommes appelés à témoigner de l'Évangile dans notre société démocratique et notre État laïc. Au cours de l'année écoulée, nous avons vu fleurir des tentatives pour exprimer d'une manière renouvelée le pacte républi­cain de la laïcité. Peut-être cet exercice aurait-il été plus fécond si les enjeux avaient été clairement expri­més. S'agissait-il d'une meilleure mise en œuvre de la laïcité ou d'une nécessaire adaptation d'un certain nombre de règles publiques à l'émergence de l'islam en France ? En tout cas, la publication par le ministère de l'Intérieur de l'ensemble des textes législatifs et réglementaires qui régissent les rapports de l'État et des cultes1 devrait aider à cette clarification. En effet, nous savons tous que beaucoup des difficultés rencon­trées, qui ne concernent pas seulement l'islam, viennent de ce que beaucoup ignorent les données légales et la jurisprudence qui en a découlé.
Historiquement, les interprétations de la loi de 1905, sous quelque majorité politique que ce soit, ont presque toujours été dans le sens d'une application libérale de la loi, comme l'avaient d'ailleurs souhaité les législateurs les plus écoutés à l'époque. Les der­niers arrêts du Conseil d'État en 2011 en sont encore un signe évident. Au contraire, ceux qui contestent cette interprétation ouverte de la loi peuvent être tentés de s'appuyer sur les excès de certains groupes mino­ritaires, qu'ils soient musulmans, juifs ou chrétiens. Nous constatons d'ailleurs que leurs tentatives de dur­cir le sens et l'application de la loi de 1905 pour tous reposent sur une illusion largement partagée et pro­fondément ancrée, selon laquelle la seule manière de réguler l'exercice des religions est de les marginaliser ou, pour dire les choses crûment, que la société sera en ordre quand les religions seront éteintes.
Répétons-le encore une fois, une lutte efficace contre les comportements fanatiques ne viendra pas d'une exclusion des religions de l'espace public. Elle suppose, au contraire, une meilleure connaissance des religions et un apprentissage pratique de leur coexis­tence. La Déclaration universelle des droits de l'homme et ses prolongements ont plus de pertinence que ses défenseurs ne le croient parfois. La liberté de conscience n'est pas seulement une liberté privée, elle suppose une liberté de culte et de manifestation publique de ses croyances dans le respect de l'ordre public. La responsabilité républicaine authentique porte donc sur ce.respect de l'ordre public et non sur l'organisation des religions. Quelques-unes de ces questions ont été reprises lors du colloque organisé par la Conférence des Responsables de Culte en France au Sénat le 17 octobre dernier.
Mais notre regard ne se limite pas à l'hexagone et aux territoires et départements d'outre-mer. Nous sommes en communion étroite avec tous les chrétiens dans le monde et plus spécialement avec ceux qui souffrent brimades et persécutions au nom de leur foi. Nous pensons à certains pays musulmans où des chré­tiens sont châtiés et lourdement condamnés. Nous pen­sons à la liberté de changer de religion qui n'est pas universellement reconnue. Nous pensons à nos frères des Églises orientales qui doivent supporter de graves injustices et même des sévices dans certains pays du Moyen-Orient. Nous pensons aux coptes, catholiques et orthodoxes, et à leur inquiétude devant l'évolution de l'Egypte.
Plus largement, notre sympathie pour ce que l'on a appelé le «printemps arabe» et l'avènement d'une certaine démocratie dans plusieurs pays ne doit pas nous aveugler. Nul ne sait ce qui sortira des urnes dans ces pays. Les observateurs occidentaux seront sans doute surpris de voir que la démocratie n'aboutit pas nécessairement à un État laïc et qu'elle peut ouvrir la voie à d'autres solutions. Les résultats des élections en Tunisie sont éclairants. Les récentes déclarations du président du Conseil de Transition libyen et la réfé­rence à la loi coranique dans la future constitution en est un bon exemple. Il n'est jamais sain de projeter nos critères d'organisation sur d'autres peuples qui n'ont pas la même histoire que nous et il nous faut savoir que la démocratie ne se limite pas à la possi­bilité d'exercer le droit de vote. Elle suppose une culture démocratique qui ne s'acquiert pas en quelques semaines.
Quoi qu'il en soit, nous voulons redire à nos frères orientaux que nous ne les oublions pas et que nous suivons attentivement leurs efforts pour rester dans le pays de leurs ancêtres et pour demeurer acteurs d'une histoire dont ils ont souvent été une des composantes les plus actives et les plus éclairées. Quand le danger mortel devient insupportable, nous veillons à ce qu'ils soient accueillis du mieux possible et à ce qu'ils puissent s'intégrer à notre société. Nous croyons aussi que nos efforts pour développer en France des rela­tions civilisées avec les autres religions, et en parti­culier avec l'islam, peuvent contribuer à changer quelque chose à leur situation dans les pays musul­mans. Le vingt-cinquième anniversaire récemment célébré de la rencontre d'Assise a été l'occasion de mettre en lumière la responsabilité partagée des reli­gions dans le service de la paix. Il a donné lieu à des rencontres entre les religions dans différents diocèses de France. Ce fut l'occasion de manifester publiquement que, contrairement à certaines thèses complaisamment diffusées, les religions ne sont pas nécessairement des causes de violence et de guerre, mais au contraire des artisans de la paix.
Nous sommes aussi en profonde communion avec nos frères d'Afrique. Le Bénin vient de fêter le 150e anniversaire de son évangélisation auquel le cardinal Barbarin et moi-même avons participé. Le Bénin va recevoir bientôt le pape Benoît XVI pour la promul­gation de l'exhortation apostolique consécutive à la deuxième session du synode des évêques pour l'Afrique. Mais nous pensons aussi à nos frères de la République démocratique du Congo en pleine période électorale à haut risque et à ceux des pays de la Corne de l'Afrique et aux populations confrontées à la famine et à des violences endémiques.

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URGENCE mobilisation:  " Carton rouge à l’euthanasie "


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